Petits terrains : les constructeurs s’adaptent

Jérôme Augereau
Mis à jour par
le 14 janvier 2022
Journaliste chez PAP.fr

Les terrains dédiés aux maisons sont de plus en plus petits. Des parcelles, soumises à des règles d’urbanisme contraignantes, qui obligent les constructeurs à faire du sur-mesure.

Les petits terrains et les règles d'urbanisme obligent souvent à construire en limite séparative. © atelier logemaine

Construire une maison sur un petit terrain fait partie intégrante du quotidien des constructeurs ! « Ces parcelles représentent désormais 23% de ma production », explique Marc Loys, gérant des maisons Elian qui construit une soixantaine de maisons par an en Ille-et-Vilaine. Les plans locaux d’urbanisme des communes, les schémas de cohérence territoriale (Scot) ont en effet réduit la taille des parcelles dédiées à l’habitat individuel que ce soit en secteur diffus* ou en lotissement**. La surface moyenne est ainsi passée de 1 000 m² il y a 15 ans à 200, voire 300 m² dans de nombreux départements.

Une hauteur de maison limitée

Ces fonciers compacts ne sont pas sans incidence sur la conception des maisons. Certains plans locaux d’urbanisme (PLU) imposent une hauteur maximale des bâtiments de 3,50 ou 4 m en limite de propriété. Les constructeurs y prévoient alors le garage. Autre alternative : un rez-de-chaussée en limite de propriété et un bâtiment décalé qui accueillera l’étage de la maison.

Les règles d'urbanisme limitant généralement la hauteur des bâtiments construits en limite séparative, les constructeurs prévoient généralement le garage. Le volume dédié à l'habitat sera quant à lui décalé de la limite pour aménager un étage. © Demeures Caladoises (Groupe Sicovar)

Une habitation alignée sur la rue

Dans certaines villes comme Rennes (Ille-et-Vilaine), les maisons doivent être alignées sur une rue. Des contraintes encore accentuées par les exigences de l’architecte-conseil qui contrôle les permis de construire. « Nous avons dû construire la maison en limite de propriété alors que les règles d’urbanisme ne l’imposaient pas », raconte Marc Loys. Pour maximiser la surface habitable, les professionnels construisent généralement deux étages sur ces parcelles. Il est ainsi possible de disposer de 140 m² sur un terrain de 200 m². « Les acquéreurs peuvent profiter de pièces plus grandes », explique le responsable. « Les chambres mesurent 12 à 13 m² et les parents disposent d’une suite parentale dépassant 25 m². Les volumes situés sous les rampants du toit permettent de créer environ 25 m² habitables. »

Les règles d'urbanisme sont souvent très contraignantes dans l'hyper-centre des métropoles comme à Rennes où cette maison a dû être construite à l'angle de deux rues. © Maisons Elian

Une intimité à préserver dans la maison

Certaines règles d’urbanisme imposent aussi une construction sur les deux limites séparatives du terrain. Les habitations sont alors mitoyennes des deux côtés. « La difficulté sur ce type de parcelle c’est la gestion du vis-à-vis », explique Stéphane Landemaine, gérant de l’Atelier Landemaine. Pour préserver l’intimité de la famille, le constructeur dispose de plusieurs solutions. Il peut prolonger le mur mitoyen en hauteur ou en longueur. Une fenêtre classique (1,20 m x 1,35 m) peut être également remplacée par une fenêtre panoramique plus haute que large pour maximiser la lumière naturelle tout en limitant les vues chez le voisin.

Pour préserver l'intimité des propriétaires, le mur séparant les deux propriétés peut être prolongé dans la longueur ou en hauteur. © atelier logemaine

Le charme du patio

Une pergola peut être aussi réalisée sur la façade arrière pour garantir l’intimité tout en se protégeant de l’ensoleillement estival. « Nous proposons souvent à nos clients la création d’un patio dans leur maison », précise Stéphane Landemaine. Implanté en limite de propriété, cet ouvrage d’une surface moyenne de 15 m² bénéficiant d’une double exposition (nord, ouest) dessert le séjour et la cuisine. Une terrasse en bois est souvent réalisée dans cet espace. « Nos clients apprécient l’intimité apportée par cette pièce supplémentaire », précise le dirigeant.

Compenser une mauvaise orientation de la maison

L’obligation de construire en limite séparative ne permet pas toujours de bénéficier d’une exposition optimale pour la maison. Or une bonne orientation est essentielle car elle permet d’augmenter les apports lumineux diminuant ainsi les besoins en chauffage des occupants. La façade arrière, qui accueille habituellement le salon séjour, si elle est orientée au sud, est parfois exposée plein nord sur certains terrains. « Dans ce cas, nous modifions l’aménagement intérieur de la maison », détaille-t-on chez les Demeures Caladoises. « Le séjour sera positionné sur la façade avant pour profiter de l’ensoleillement. La cuisine sera implantée en façade arrière ». Pour maximiser l’ensoleillement, un séjour traversant permettra de bénéficier d’une double-exposition. Autre alternative pour augmenter les apports lumineux : l’implantation de fenêtres en saillie sur la façade si les règles d’urbanisme en vigueur sur la commune le permettent. Des coupoles peuvent être aussi installées sur les toitures terrasses pour éclairer les pièces.

Les fenêtres de toit permettent de maximiser les apports lumineux dans une maison mitoyenne des deux côtés. © Velux®

Une architecture très créative

Si la forme des maisons est souvent contrainte par la taille de la parcelle et les règles d’urbanisme, l’architecture n’est pas bridée pour autant. Bien au contraire ! Certains constructeurs marient les briques à l’enduit pour la façade du rez-de-chaussée et optent pour une ossature bois avec un bardage métallique à l’étage. « J’ai proposé à mes clients d’implanter un jardin d’hiver à l’étage alors qu’il aurait été possible de réaliser un toit-terrasse. Mais ce dernier n’aurait pas pu être utilisé », explique Stéphane Landemaine. Des balcons sont aussi créés au premier étage. Ces ouvrages sont coiffés d’une casquette, la baie vitrée étant protégée quant à elle des rayons du soleil par un panneau coulissant.

En dépit de la forme de la parcelle, le constructeur a réussi à aménager un petit jardin sur la façade arrière. © Simon BOURCIER

 * Secteur diffus : un terrain qui n’est pas forcément raccordé aux réseaux : eau, électricité, gaz, assainissement.
** Lotissement : une procédure d’urbanisme qui propose des lots à bâtir raccordés aux réseaux.

Une maison plus difficile à construire
On ne construit pas de la même façon sur un terrain de 200 m² que sur une parcelle de 1 000 m² ! En secteur dense, les maisons construites en limite mitoyenne des deux côtés disposent rarement d’un accès à l’arrière du lot. Conséquence : les terres issues du terrassement doivent être évacuées au début du chantier. Une évacuation qui peut coûter cher ! « Pour un terrain plat, il faut compter environ 1 000 € contre 4 000 € pour un terrain pentu car ce dernier nécessitera des travaux de terrassement plus conséquents », précise-t-on chez les Demeures Caladoises.
La réalisation du gros œuvre peut nécessiter parfois le démontage de la clôture ou la démolition du mur du voisin s’il faut construire en limite séparative. Une rencontre avec le propriétaire est indispensable pour obtenir les autorisations nécessaires au bon déroulement du chantier. La gestion des déchets est aussi différente. Faute de pouvoir stocker les déchets sur un petit terrain, le camion devra revenir plus souvent pour les évacuer. Autant de coûts supplémentaires qui devront être intégrés au budget ! 


La rédaction vous conseille