« Les acquéreurs nont pas conscience de limportance des règles durbanisme. Ils sont persuadés quils peuvent implanter leur maison où ils veulent sur leur terrain. Mais ce nest pas le cas ! ». Cest le constat sans appel dressé par Wilfried Maduli, géomètre-expert et membre du bureau national de lUnion nationale des géomètres-experts (UNGE). Les règles durbanisme sont pourtant incontournables, car elles encadrent les projets de construction et de rénovation sur la commune. Construire sa maison en a sélectionnées cinq qui peuvent impacter fortement larchitecture de votre maison et sa localisation sur le terrain.
Un certificat durbanisme précieux
Avant dacheter un terrain, demandez à la mairie un certificat durbanisme dinformation (CU). Ce document vous donnera de précieux renseignements sur cette parcelle comme son classement, les règles durbanisme, la présence de servitudes dutilité publique. Le taux de la taxe daménagement vous sera aussi communiqué. « Les acquéreurs nappréhendent pas cette taxe qui doit être payée. Elle atteint quand même en moyenne 6 000 € », précise Wilfried Maduli, géomètre-expert et membre national de lUnion nationale des géomètres-experts (UNGE). Autre atout du CU : les règles durbanisme mentionnées ne peuvent pas changer pendant dix-huit mois, même si la mairie modifie son plan local durbanisme pendant cette période.
Un certificat durbanisme pré-opérationnel peut être aussi demandé, une démarche rarement entreprise par des particuliers pressés qui ne veulent pas attendre deux mois pour le recevoir, soit le délai dinstruction. Ce document est pourtant essentiel, car il se prononce sur la capacité des réseaux (assainissement, eau potable et électricité) à desservir le terrain. Si lun des deux (eau potable ou électricité), voire les deux, se situent à plus de 100 m de la maison, la collectivité locale peut refuser le permis de construire, car elle na pas forcément prévu de financer lextension du réseau (article L332-15 du Code de lurbanisme). En revanche, si le terrain est situé à moins de 100 m du réseau, le permis de construire sera accordé à la condition que le particulier finance le raccordement de sa maison au réseau. Autre point contrôlé : laccès au terrain depuis la voie publique. Si la mairie estime que ce dernier est dangereux, elle pourra refuser le permis.
1. Une emprise au sol limitée
Un terrain de 600 m² ne vous permettra pas de construire sur lintégralité de la parcelle. Cest le coefficient demprise au sol (CES) qui définit la surface constructible autorisée. Un CES de 0,2 appliqué à notre parcelle de 600 m² se traduira par une emprise au sol de 120 m². Si vous comptiez construire une maison de plain-pied de 150 m², ce ne sera pas possible ! En revanche, rien ne vous empêche de construire au rez-de-chaussée 120 m² et dajouter un étage de 120 m², soit 240 m² au total, lemprise au sol de 120 m² étant toujours respectée. À noter que la surface autorisée inclut cependant la piscine ou un abri de jardin Autant déquipements quil conviendra dintégrer dans votre projet sous peine de voir votre permis de construire refusé.
2. Des limites de propriété imposées
Certains règlements interdisent la construction en limite de propriété. Cest notamment le cas en première couronne des grandes agglomérations où les terrains sont de petites tailles, de 300 à 400 m². « Pour les acquéreurs, cest un drame ! », observe Wilfried Maduli. « Avec par exemple une distance minimale imposée de 3 m entre les limites de propriété et la future construction, la parcelle peut se retrouver inexploitable. La forme de la maison sera très impactée. » Une règle à laquelle les acquéreurs peuvent cependant se soustraire sils achètent un terrain prêt à bâtir dans un lotissement. Dans cette opération daménagement, il est en effet possible dutiliser larticle R 151-21 du Code de lurbanisme (si le Plu ne sy oppose pas). Ce dernier stipule que les règles durbanisme sappliquent en périphérie du lotissement et non au sein des parcelles achetées par les acquéreurs à lintérieur du périmètre du lotissement.
Vérifiez les limites du terrain
Avant dévaluer les possibilités offertes par un terrain en termes de construction, vérifiez sil est borné. Cest le premier réflexe à avoir ! Une parcelle bornée dispose de bornes ou déléments matérialisant les limites séparatives qui seront reproduites sur le plan de bornage effectué par le géomètre-expert. Vous aurez ainsi lassurance de ne pas construire chez le voisin. Et vous pourrez plus facilement évaluer si votre projet de construction est réalisable sur cette parcelle en fonction des règles durbanisme. Une grande part dentre elles sont calculées à partir des limites séparatives et la superficie du terrain.
3. Les servitudes d'utilité publique
Les servitudes dutilité publique doivent être aussi étudiées. Ces dernières limitent vos droits pour construire ou utiliser le sol. Il sagit par exemple dune servitude relative à la conservation du patrimoine. Cest le cas si votre future maison est située dans un secteur dépendant des architectes des Bâtiments de France (ABF) qui veillent à la bonne intégration des constructions à proximité de monuments classés. Ces professionnels peuvent imposer lutilisation de certains matériaux comme des tuiles écailles, des menuiseries de couleur gris clair ou beige, voire en bois. Autant de produits plus chers qui augmenteront le coût global de la maison et peuvent inciter les acquéreurs à renoncer à lachat du terrain ou à revoir à la baisse les prestations initialement choisies. Outre le surcoût, construire une maison en secteur ABF se traduit par un allongement du délai dinstruction du permis de construire. Il faut compter deux mois supplémentaires pour lABF qui sajouteront au délai dinstruction du permis de construire par la mairie, soit quatre mois au total.
4. Les servitudes de droit privé
Autres règles à étudier : les servitudes de droit privé. Ces dernières ont été élaborées par le propriétaire du terrain. Elles sappliquent souvent à des biens issus dune division parcellaire lorsquun terrain a été partagé en plusieurs lots. Ces règles ont été écrites par lancien propriétaire de la parcelle pour préserver son intimité. Il peut sagir dun recul exigé de 10 m entre la limite séparative et la future maison. Certaines règles peuvent même avoir une incidence sur larchitecture de lhabitation comme lobligation de construire une maison en rez-de-chaussée et non en étage pour éviter davoir une vue sur la piscine du voisin.
5. Des règles sanitaires à respecter
Il peut aussi sagir dune distance à respecter entre des bâtiments agricoles abritant des animaux et la future construction. Selon le nombre de vaches accueillies dans une stabulation, un recul minimal simpose, ce dernier pouvant atteindre 100 m. « Cette règle peut occasionner une vraie contrainte pour la famille faisant construire. Ainsi, pour un terrain de 600 m², il fallait respecter une distance de 100 m entre le bâtiment et la maison, ce qui a conduit à ne pas pouvoir construire sur une bande de 10 m de profondeur. La constructibilité de la parcelle sen trouvait réduite », raconte Wilfried Maduli.
Lil du professionnel
Incontournables, les règles durbanisme doivent être examinées avant dacheter votre terrain. Vous pouvez prendre un rendez-vous au service urbanisme de la ville pour connaître celles qui seront applicables à votre parcelle. Mais si certaines règles sont claires, ce nest pas toujours le cas ! Vous pouvez faire appel à un constructeur qui vous aidera. « Nous pouvons décrypter certaines règles qui ne sont pas toujours simples pour un particulier », explique Miguel Gomes, patron dYvelines Tradition, un constructeur haut de gamme. Un service gratuit qui vous évitera dacheter un terrain sur lequel votre projet de construction ne pourrait pas voir le jour.
Un vendeur à questionner
Très contraignantes, les servitudes privées doivent être étudiées bien avant lachat du terrain, comme le conseille Wilfried Maduli, géomètre-expert : « Avant la signature du compromis de vente, le premier réflexe, cest de questionner le vendeur du terrain sur lexistence de règles de droit privé. Car ces dernières sont opposables aux futurs propriétaires du terrain ». La méconnaissance de ces règles peut être dailleurs lourde de conséquences. En effet, une collectivité locale peut accorder le permis de construire en ignorant lexistence de ces règles privées. Le voisin de la parcelle achetée peut alors attaquer la famille ayant fait construire, car ces dernières nont pas été respectées. Le juge peut ordonner la destruction de la partie du bâtiment empiétant sur le terrain du voisin.