Energie : quel chauffage avec la RE2020 ?

Manuel Apruzzese
Publié par
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Journaliste chez PAP.fr

Depuis la RE 2020, le chauffage 100 % gaz et les radiateurs effet Joule ne sont plus autorisés. Tour d’horizon des solutions compatibles avec le nouveau texte.

Les pompes à chaleur équipent près de 75 % des maisons neuves. www.poujoulat.fr © Poujoulat

Depuis janvier 2022, c’est la Réglementation environnementale 2020 (RE 2020) qui fixe les règles de la construction. Côté chauffage, elle marque un tournant historique avec la quasi-disparition des énergies fossiles (le gaz naturel). Son objectif ? Diminuer l’impact carbone des maisons, améliorer leurs performances énergétiques et renforcer le confort d’été en vue d’épisodes caniculaires de plus en plus fréquents.

La RE 2020 et le chauffage  

Quels sont les objectifs de la Réglementation environnementale 2020 ? Tout simplement des maisons plus vertueuses en matière d’environnement. Elles doivent être encore plus sobre en énergie et surtout moins émettrices de gaz à effet de serre (GES). La RE 2020 veut réduire de 30 % les besoins en énergie de la maison et elle acte la sortie du gaz naturel. S’il n’est pas formellement interdit, les seuils maximaux d’émissions de gaz à effet de serre de 4 kg de CO2 par an et par mètre carré sont inatteignables, même avec une chaudière à condensation performante. Le texte prévoit néanmoins des dérogations jusqu’en 2023 pour les projets déposés avant le 31 décembre 2023 lorsqu'un permis d'aménager prévoyant une desserte en gaz a été délivré pour la parcelle. Après cette date, il faudra choisir un autre mode de chauffage.

De son côté, l'électricité voit son contenu carbone divisé par trois. Il passe de 210 g de CO2/kWh à 79 g ! Autre changement, le coefficient de conversion de l’électricité passe de 2,58 à 2,3. On considère maintenant qu'il faut 2,3 kWh d'énergie primaire pour produire 1 kWh d'énergie électrique finale. Dans ce nouveau contexte réglementaire, l’énergie électrique (on ne parle surtout pas de convecteurs !) est privilégiée.

Enfin, l’indice le Bbio des maisons est abaissé de 30 % par rapport à la RT 2012. Il met en valeur l’efficacité du bâti avec de bonnes orientations pour favoriser les apports thermiques naturels, des ouvertures, une très faible perméabilité à l’air, une très bonne isolation thermique, et ce, quels que soient les dispositifs techniques mis en place. La RE 2020 se rapproche du standard du bâtiment passif. Ce qui revient à quasiment se passer de chauffage. Inutile donc d’installer des matériels de forte puissance.

Le rôle du bureau d'étude thermique

Le bureau d'étude thermique (BET) joue un rôle essentiel dans la conception de la maison. Son but ? Faire passer à la maison l'examen de la RE 2020. Il va réaliser des études thermiques, optimiser les performances énergétiques et vérifier si les solutions de chauffage envisagées (pompe à chaleur, biomasse...) sont compatibles avec les exigences du texte. Le BET peut aussi proposer des solutions techniques pour atteindre les objectifs. Une fois le choix de chauffage arrêté, il calculera alors les puissances nécessaires pour chauffer la maison.

La maison est modélisée dans un logiciel. Ses caractéristiques thermiques et environnementales, les matériaux mis en œuvre sont renseignés ainsi que le mode de chauffage envisagé. Le logiciel « mouline » ensuite les données et délivre le résultat de conformité ou non à la RE 2020. Si le résultat est négatif, le BET préconise alors des mesures compensatoires.

Chauffage : ce qui n’est plus possible

La RE 2020 a profondément rebattu les cartes du chauffage dans la maison neuve. Un certain nombre de combinaisons possibles avec la RT 2012 ne sont désormais plus possibles. Ainsi, les solutions chaudière condensation gaz + chauffe-eau thermodynamique sont proscrites.

  • Le chauffage électrique 100 % effet Joule avec un ballon thermodynamique n’est plus possible. Il ne passe plus dans le moteur de calcul de l’étude thermique.
  • Les associations Pac air/air + effet Joule + chauffe-eau thermodynamique, les poêles + effet Joule + chauffe-eau thermodynamique et les Pac air/air réversibles restent possibles avec toutefois un travail encore plus poussé sur l’isolation du bâti et/ou une optimisation du confort d’été.

Les pompes à chaleur s’imposent 

Côté environnemental, on ne fait pas mieux que la Pac. La pompe à chaleur prélève les calories naturelles dans son environnement immédiat, l’air ou le sol, et restitue en moyenne quatre fois plus de kilowatts qu’elle n’en consomme (avec zéro émission de gaz à effet de serre). Ses émissions de CO2 sont faibles : jusqu’à 70 % en moins par rapport aux solutions 100 % gaz naturel, pour un très bon niveau de confort. Cette technologie est la solution la plus efficace pour atteindre les objectifs de décarbonation du chauffage.

La pompe à chaleur air/eau est la star du chauffage dans les maisons neuves. www.daikin.fr © daikin

Résultat, qu’elles soient air/eau ou air/air, les pompes à chaleur sont plébiscitées dans les maisons neuves ! Tendance confirmée par les derniers chiffres de Pôle Habitat-FFB : plus des trois quarts des acquéreurs (76 %) optent pour ce mode de chauffage. Manifestement, l’effet RE 2020 se fait sentir… D’ailleurs, selon plusieurs études EDF, c’est le système de chauffage préféré des Français. Autre atout, la Pac répond également à la prise en compte du confort d’été contenue dans la RE 2020. Qu’elle soit air/eau réversibles ou air/air, elle pourra rafraîchir la maison pendant les épisodes caniculaires.

Pompe à chaleur air/eau ou air/air ?

Deux solutions techniques se disputent le marché de la maison individuelle. La Pac air/eau équipe près d’une maison sur deux (source Pôle Habitat-FFB). Techniquement, elle capte les calories contenues dans l’air et les restitue dans le réseau de chauffage hydraulique. La Pac air/eau peut également produire l’eau chaude sanitaire et si elle est prévue pour cela être inversée pour rafraîchir la maison en été. Il faut compter sur un budget compris entre 8 000 et 14 000 € pour une Pac air/eau.

La Pac air/air capte aussi les calories présentes dans l’air extérieur, mais elle les transforme en air chaud qu’elle diffuse à l’intérieur à travers des systèmes de diffusion d’air. C’est le vecteur air. Elles sont particulièrement appréciées dans le sud de la France où les hivers sont doux, mais de plus en plus chauds. Ce type de pompe à chaleur s’apparente à un système de climatisation basse consommation. En revanche, elle ne peut pas produire d’eau chaude. Elle devra être associée à un ballon thermodynamique. Côté prix, il faut prévoir un budget compris entre 2 000 et 4 000 €.

Comment marche une pompe à chaleur ?

La pompe à chaleur utilise un principe conçu pour la réfrigération. Quel que soit le mode de prélèvement choisi (air ou sol), les calories sont récupérées dans un évaporateur qui contient un fluide frigorigène. Au contact de la chaleur, celui-ci se transforme en vapeur. Le compresseur électrique aspire alors ce fluide, le comprime et en augmente la température. Ce fluide chaud est transféré à un condenseur. Il cède sa chaleur à l’eau du circuit de chauffage où il chauffe l’air en se condensant. Le gaz frigorigène va condenser, passant de l’état gazeux à l’état liquide. Le fluide revient alors dans l’évaporateur où il recommence un nouveau cycle. Et ainsi de suite.

Des fluides frigorigènes de plus en plus verts
Pendant longtemps, les fluides frigorigènes chlorés, fluorés ou contenant des hydrofluorocarbures installés dans les pompes à chaleur ont été reconnus très nocifs pour la couche d’ozone. Interdits par la réglementation européenne, ils sont remplacés par un fluide frigorigène plus vert (le R32) sans conséquence sur la couche d’ozone et plus performant de 5 à 10 % que le R410A.

Le 100 % gaz, c’est presque fini !

Une page se tourne pour les énergies fossiles. Après le fioul, c’est au tour du gaz naturel de disparaître presque définitivement. Malgré de très bons rendements, le chauffage 100 % gaz dans la maison neuve, c'est fini ! Le gaz est suspendu à l’exigence sur les émissions de CO2 (4 kg de CO2/m2/an). Un niveau qui exclut de facto le 100 % gaz. Le gaz naturel entame néanmoins sa mue vers la décarbonation avec l’injection dans les réseaux de gaz vert (biométhane et hydrogène).

Seules les chaudières à condensation, en raison de leurs performances, restent autorisées. Elles devront obligatoirement être associées à un autre matériel faisant appel à une énergie renouvelable (ballon thermodynamique, panneau photovoltaïque, chauffe-eau solaire…).

Le gaz oui… mais avec une Pac

Pour les inconditionnels du gaz, il ne reste plus que la chaudière hybride, une solution originale et très performante. C’est une chaudière à condensation associée à une pompe à chaleur air/eau.

Ces appareils répondent aux objectifs de la RE 2020 avec des émissions de gaz à effet de serre sous le seuil des 4 kg de C02/m2. Selon les circonstances, le système choisit le matériel le plus efficient. La Pac fonctionne à 100 % quand les conditions météorologiques sont optimales pour elle. Tant que son rendement est acceptable, c’est-à-dire au-dessus de 0 °C, elle prend en charge 100 % du chauffage. Dès que les conditions se dégradent, c’est la chaudière qui prend le relais. Tout réside dans la gestion intelligente des deux machines. En fonction de la température de consigne et de la température extérieure, le système de gestion fera le choix le plus judicieux. La chaudière assurera l’essentiel de la production de l’eau chaude sanitaire. Autre possibilité intéressante, le cerveau de l’installation peut aussi choisir d’utiliser le kilowatt le moins cher. Grâce aux compteurs intelligents Linky pour l’électricité et Gaspar pour le gaz, ce basculement est possible.

Côté prix, une Pac hybride gaz se situe aux alentours de 3 000 € HT hors pose. Ce montant varie en fonction de la puissance ou des marques. L’entretien d’une Pac hybride est annuel et peut faire l’objet d’un contrat de maintenance unique d’un montant compris entre 200 et 250 € par an.

Le bois, l’autre énergie

Le RE 2020 favorise le chauffage à biomasse (bûches, pellets, bois déchiquetés…), autrement dit les poêles et chaudières à bois. L’énergie bois coche presque toutes les cases de la RE 2020 : elle est renouvelable, les approvisionnements se font en circuit court et la ressource disponible est abondante. Enfin, le kilowatt produit par le bois est le moins cher du marché. Dans les maisons neuves, il n’est pas nécessaire d’installer des matériels puissants. Côté matériel, deux possibilités : soit un poêle à granulés, soit une chaudière à bois ou à granulés. Le poêle à pellets associé à des panneaux radiants dans les chambres séduira particulièrement les petits budgets. Avec des bâtis très performants, la chaudière ne s’impose pas forcément. Attention, la RE 2020 ne reconnaît que les appareils de chauffage bois labellisés Flamme verte 7 étoiles.

L'autre grand gagnant de la nouvelle réglementation, c'est le poêle à granulés. palazzetti.fr © Palazzetti

Label Ecodesign obligatoire

L'étiquetage actuel des appareils de chauffage, poêles, inserts, chaudières est une mine d’informations. L’étiquette obligatoire mentionne le nom du produit, sa marque, sa référence commerciale, sa puissance directe et indirecte (en kW), sa classe d'efficacité énergétique, variant de G (plus mauvaise performance) à A ++ (meilleure performance). Pour les chaudières, le rendement nominal ou utile est aussi indiqué : le rapport entre la puissance du combustible et la puissance thermique fournie à l'eau de chauffage. Pour les pompes à chaleur, le coefficient de performance est mentionné : le rapport entre la puissance thermique et la consommation électrique. Écodesign enrichit l’étiquette de nouvelles informations comme la quantité de polluants potentiellement dangereux tels que l'oxyde d'azote, le monoxyde de carbone, les composés organiques gazeux… Les rendements énergétiques prenant en compte les impacts environnementaux et la variation de consommation d'énergie selon la période d'utilisation sont également notés.


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