Maison autonome : du rêve à la réalité

Jérôme Augereau
Publié par
le
Journaliste chez PAP.fr

Si une maison autonome couvrant 100 % de ses besoins énergétiques est un rêve, il reste toujours possible de s’en approcher. Explications.

Une trentaine de maisons autonomes ont été construites en France depuis sept ans. © DariuszJarzabek/Shutterstock

Et si mon habitation produisait l’énergie nécessaire au chauffage, à l’eau chaude et à mon électricité ? C’est le principe d’une maison autonome, un concept qui intéresse de plus en plus de particuliers à l’heure où le prix de l’énergie tutoie les sommets.

Peu de maisons autonomes en France

Peu présent dans le paysage français, ce type de construction est plutôt réalisé par des particuliers construisant eux-mêmes leur habitat. Rares sont les entreprises à avoir conçu un véritable concept qui se décline quelles que soient les régions. Mamaisonautonome.com, une société fondée par l’architecte, Dominique Lasne, déroge néanmoins à la règle. Une trentaine de maisons autonomes ont été construites en France depuis sept ans. Les maisons passives qui peuvent presque se passer de chauffage grâce à leur excellente isolation se montrent, elles aussi, les plus économes. Focus sur ces constructions pas comme les autres. 

Stocker la chaleur du soleil pour baisser ses besoins de chauffage

Pour diminuer ses besoins en chauffage, une maison autonome doit tout d’abord capter les rayons du soleil directement par les baies vitrées. Une règle qui suppose de privilégier une orientation sud pour la cuisine, le salon-séjour et une chambre. Si une bonne exposition est également respectée par les maisons traditionnelles pour être conforme à la RE 2020, l’habitat autonome va plus loin. Pour suivre la course du soleil tout au long de la journée, les maisons autonomes conçues par Dominique Lasne adoptent la forme d’une coquille Saint-Jacques. Grâce à cette demi-sphère, toutes les pièces bénéficient de la chaleur du matin au soir.

Il faut bien isoler sa maison

Capter la chaleur, c’est bien ! Mais réussir à la conserver dans la maison, c’est mieux avec une isolation de qualité. Sans surprise, ces maisons ont adopté l’ossature bois pour les murs. Les montants verticaux sont isolés par différents produits biosourcés (issus du monde végétal). Selon les habitudes des artisans, de la ouate de cellulose, de la fibre de bois, voire de la paille peuvent être utilisés.

👉 À la clé : une isolation performante qui empêche la chaleur de sortir de la maison.

Faire construire votre maison

Le mur chauffe une maison autonome

Le soleil chauffe aussi des capteurs thermiques implantés sur la toiture exposée sud sur une surface de 4 m² pour une maison de 100 m². Sous l’effet du soleil, le fluide caloporteur alimente un ballon de 1 000 l qui dessert un réseau de tuyaux placés dans un mur composé de briques en terre crue. Ce radiateur facilite le stockage de la chaleur et la diffuse progressivement dans la maison. « Ce mur remplit trois fonctions », décrit Dominique Lasne. Il sépare les pièces de jour des pièces de nuit, joue le rôle de radiateur et contribue à l’isolation. » Si cette installation fonctionne la très grande partie de l’année, il arrive que la lumière ne soit pas au rendez-vous !

🪵 Un poêle bouilleur à bûches couvre les besoins en chauffage et en eau chaude sanitaire 5 % de l’année, soit une facture comprise entre 100 et 150 € par an. « Atteindre une autonomie de 100 % n’est pas possible », admet Dominique Lasne.

☀️ Il faut se protéger du soleil

Presque autonome en chauffage l’hiver, cette maison contribue aussi au confort d’été sans l’installation d’une climatisation. Les débords de toiture d’un mètre à un mètre cinquante positionnés du sud au sud-est empêchent les rayons du soleil de pénétrer évitant la surchauffe des pièces. Des volets extérieurs sont également installés sur les baies exposées au sud, les pièces orientées au nord étant dotées de volets intérieurs.

La géothermie rafraîchit l'air ambiant

La fraîcheur est également garantie grâce à la géothermie. Placé sous la maison à une profondeur de 30 cm, un réseau de tuyaux d’une centaine de mètres dans lequel circule de l’eau, capte la fraîcheur du sol, soit 16°C. Cette eau alimente ensuite les tuyaux positionnés dans le mur en terre crue qui fait office de radiateur l’hiver. Et le confort intérieur peut être encore amélioré ! Il suffit en effet de ventiler le soir sa maison quand la température extérieure baisse pour que le frais pénètre dans les pièces. Le mur capte la fraîcheur et la restitue progressivement.

⚡️ Produire son électricité pour être autonome

Les adeptes de ces maisons visent aussi une autonomie en électricité pour ne pas être connectés au réseau électrique. Huit capteurs photovoltaïques délivrant une puissance de 400 W assurent presque une autonomie totale pendant toute l’année grâce aux vingt-quatre batteries, ces dernières stockant l’électricité qui ne serait pas consommée dans l’habitation. Mais il est tout de même conseillé d’acheter un groupe électrogène pour produire l’électricité nécessaire si le soleil est aux abonnés absents pendant plusieurs semaines, l’hiver notamment. Et d’adopter également de nouvelles habitudes en limitant ses besoins : pas de lumières allumées inutilement, acheter des appareils électroménagers très économes en énergie…

Les capteurs photovoltaïques permettent d'assurer une grande partie des besoins en électricité de la maison à condition d'installer des batteries. © sl-f/Getty Images

Récupérer son eau pour être autonome

Dernier point et non des moindres : l’eau. Si vous souhaitez ne pas vous raccorder au réseau d’eau, une cuve enterrée pouvant récupérer entre 7 et 20 m3 d’eau de pluie peut être installée. Cet équipement doit être doté d’un filtre charbon pour que l’eau puisse être utilisée. Les toilettes sèches constituent l’équipement adéquat pour ne pas consommer d’eau. Mais l’autonomie totale exige de nouvelles habitudes, comme le conseille Dominique Lasne : « Il faut changer de vie en stockant l’eau l’hiver et ne pas la gaspiller ». Si vous souhaitez bénéficier de l’eau de la ville, vous devrez vous doter d’un double réseau qui évitera que les eaux soient mélangées. L’eau distribuée par le fournisseur pourra être ainsi utilisée pour la douche, la cuisine. L’eau récupérée par votre toiture pourra alimenter vos toilettes, l’arrosage de votre jardin.

👉 C’est à vous de définir le niveau d’autonomie que vous souhaitez pour votre maison.

Les maisons passives sont proches de l'autonomie

Si les maisons passives en bois ne revendiquent pas une autonomie énergétique, elles s’en rapprochent. Grâce à leur isolation renforcée, ces constructions affichent déjà des besoins en chauffage très faibles. Ces derniers sont d’ailleurs si bas que ces habitations peuvent se passer de chauffage, les apports du soleil et la chaleur dégagée par le fonctionnement des appareils électroménagers suffisant à chauffer. Mais la température peut atteindre cependant 14°C quelques jours dans l’année. Un poêle à granulés, voire une résistance électrique positionnée sur les bouches d’air de la VMC double flux sont généralement installés.

Récupérer la chaleur des eaux usées

Outre le chauffage, certains constructeurs de maisons passives s’attaquent aussi à la production de l’eau chaude sanitaire, très consommatrice d’énergie. À l’image de Positive Home, qui installe des récupérateurs de chaleur sur les eaux usées de la douche pour diminuer la facture énergétique de ses clients. Commercialisés par Evolsys, ces appareils récupèrent la chaleur des eaux de la douche ou de la baignoire. « Ce qui permet de chauffer l’eau qui arrive au mitigeur de la douche. Sa température s’élève alors à 30° contre 12° habituellement. Ce qui permet de bénéficier de 25 à 66 % d’économies d’énergie », explique un collaborateur de la société.

💨 Rafraîchir sans climatisation

Dans les maisons passives, le confort d’été peut être également traité ponctuellement par le rafraîchissement adiabatique. Le principe ? Il s’agit d’une installation composée d’une unité de rafraîchissement associée à une VMC double flux. L’air chaud vicié qui doit être évacué de la maison passe par une matrice humidifiée qui le rafraîchit. Cette fraîcheur refroidit l’air entrant qui est ensuite soufflé par les bouches de la VMC double flux dans les pièces de la maison. L’été, cet air extérieur pouvant atteindre 32°C est diffusé à 24°C dans l’habitation.

Si l’impact est réel dans les pièces, ce procédé nécessite cependant l’utilisation de 2 litres d’eau par heure, une consommation qui peut poser problème à l’heure où cette ressource se fait plus rare. « Cet équipement peut être utilisé pendant une canicule », explique Laurent Henry, ventiliste à Haubourdin (59) qui pose cet équipement depuis deux ans dans les maisons passives. « C’est cohérent pour une courte durée comme quinze jours dans l’année. Mais ce n’est pas adapté pour les maisons construites dans le sud-est de la France où les besoins de rafraîchissement sont plus importants. »

💰Maison autonome : combien ça coûte ?

Si vous souhaitez faire construire une maison autonome, prévoyez un budget compris entre 2 500 et 3 000 €/m². Les maisons passives qui se montrent très économes en énergie affichent des prix assez proches. Chez Positive Home, les maisons de 100 à 120 m² se vendent entre 250 000 et 300 000 €. Ces prix restent en revanche supérieurs à ceux des constructions traditionnelles qui se vendent en moyenne entre 1 800 et 2 000 €/m², des maisons qui demeurent cependant performantes.

🗣️ « Ces constructions coûtent plus cher, car elles sont plus qualitatives », reconnaît Yvan Baudouin, président de Positive Home et par ailleurs président de l’association La maison passive qui promeut un mode constructif économe en énergie. « Mais nous entrons dans une nouvelle ère. Nous sortons du consumérisme pour la sobriété. Il sera rentable d’avoir des frais de fonctionnement de sa maison réduits alors que le coût de l’énergie augmentera. »

Maison autonome : « On s’y sent bien ! »

La hausse du prix du kilowatt d’électricité ? Aucun impact pour Anthony Gravouil. Et pour cause ! Ce père de famille de cinq enfants ne possède plus d’abonnement électrique grâce à sa maison autonome, sortie de terre à Palluau (85), selon le modèle proposé par Dominique Lasne, fondateur de Ma maison Autonome. Son habitation de 169 m² est dotée de seize panneaux photovoltaïques couplés à huit batteries.

👉 Sa production électrique couvre la plupart de ses besoins. Et il peut compter sur son groupe électrogène qui tourne environ 250 heures par an quand le soleil se montre insuffisant. En ce qui concerne le chauffage, le bilan reste également très positif. Le mur alimenté par l’eau réchauffée par les capteurs thermiques lui permet de bénéficier l’hiver d’une température intérieure de 24°C. Et si le soleil fait défaut, c’est le poêle à bûches qui prend le relais pendant une courte période. « J’ai consommé peu de bois, le poêle fonctionnant rarement, pas plus de trois heures par jour. » 

👉 Pour s’approvisionner en eau, pas besoin d’un récupérateur d’eau de pluie. Il suffit de bénéficier d’une source. Encore fallait-il en trouver une sur le terrain, un critère clé dans la recherche de la parcelle pour cette famille. La femme d’Anthony Gravouil et son beau-père ont découvert une source à 35 m de profondeur en inspectant ce terrain de 1 500 m², situé à 300 m de l’église. Une eau potable de qualité qui assure désormais les besoins en eau de toute la famille.

Si l’autonomie énergétique que lui procure sa maison lui plaît, ce n’est pas son seul atout. La forme de la construction, la hauteur sous plafond, l’ensoleillement dont la famille profite tout au long de la journée leur procurent du bien-être. Ravi de ce nouvel habitat, Anthony Gravouil est d’ailleurs devenu le meilleur des ambassadeurs de la maison autonome.

📆 Début octobre, il participera aux journées portes ouvertes en faisant visiter sa maison comme l’an dernier. « Ce type de maison questionne les gens. Si on peut faire évoluer les mentalités », conclut-il.

Cliquez sur un département pour voir
des offres de maisons neuves avec terrain


La rédaction vous conseille