Isolation : des matériaux de plus en plus verts

Manuel Apruzzese
Publié par
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Journaliste chez PAP.fr

Avec la RE 2020, la maison individuelle entame sa mue. Elle fait une large place aux matériaux biosourcés pour réduire son empreinte carbone. L’isolation n’y échappe pas.

La forte densité de la fibre de bois assure un très bon déphasage thermique. Un plus pour le confort d'été. © Pavatex by Soprema

Le vert gagne du terrain dans la maison neuve ! Il est aujourd’hui difficile, voire impossible, de faire l’impasse sur les matériaux de construction écologiquement responsables et moins émetteurs de gaz à effet de serre. « Si le biosourcé reste encore marginal dans la maison neuve maçonnée, il est très présent dans les maisons à ossature bois. Le resserrement des seuils carbone prévus en 2025, 2028 et 2031 devrait accélérer son développement », prédit François Magueur, chef de marché isolants biosourcés chez Soprema. Les matériaux de second œuvre, dont les isolants, n’échappent pas à cette lame de fond.

La RE 2020 impose le biosourcé

La Réglementation environnementale 2020 (RE 2020) a posé les bases de modes constructifs plus ambitieux et exigeants tant en termes de conception que de construction. L’objectif affiché est d’atteindre par étapes la neutralité carbone à horizon 2050. Elle impose notamment de faire appel à des matériaux biosourcés à faible bilan carbone pour en diminuer l’impact sur le climat. L’empreinte carbone des matériaux mis en œuvre est mesurée et intégrée dans le moteur de calcul des bureaux d‘études.

🪪 Obtention du permis de construire facilitée

Moins le matériau émettra de carbone durant tout son cycle de vie (de sa fabrication au recyclage), plus le permis de construire sera facile à décrocher. « Les matériaux biosourcés contribuent à atteindre un niveau de performance environnementale élevé en termes d’émissions de gaz à effet de serre du projet sur tout le cycle de vie du bâtiment », confirme un rapport du Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement (Cerema). Les résultats des Analyses de cycle de vie (ACV) des matériaux mis en œuvre dans la maison sont aussi pris en compte au travers des Fiches de déclaration environnementale et sanitaire (FDES). Et les matériaux biosourcés sont plutôt bien classés.

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Qu'est-ce que le biosourcé ?

Pour être considéré biosourcé, l’isolant doit être produit à partir de matières organiques renouvelables d'origine végétale ou animale. Et François Magueur de préciser, « la fibre de bois est produite à partir d'aubiers et de déchets d’exploitation forestière transformés en isolants thermiques et acoustiques : panneaux rigides, semi-rigides et vrac ». Mais attention, le biosourcé n’est pas un matériau 100 % vert. La matière première doit subir une transformation et nécessite des adjuvants chimiques. Leur composition peut intégrer des additifs pour résister aux moisissures, aux insectes ou au feu. La laine de bois sera traitée contre les insectes xylophages et le feu avec du sel de Bore. La laine de mouton devra passer dans différents bains de traitement avant d’être transformée en isolant. Un traitement contre les mites sera également nécessaire. La ouate de cellulose sera ignifugée.

Côté performances thermiques, il n’y a pas de différences notables avec les isolants traditionnels. « Le principe de fonctionnement des isolants biosourcés, quels qu’ils soient, repose sur le même principe. La fibre de cellulose est creuse et contient de l’air qui fait le lambda hivernal. La fibre de cellulose assure le reste : isoler de la chaleur, du bruit, perméabilité à la vapeur d’eau », détaille François Magueur. En revanche, le point fort des biosourcés, notamment la fibre de bois, c’est le déphasage important qui joue un rôle essentiel sur le confort d’été. Autre caractéristique intéressante : la perspirance. Elle favorise l’évacuation de l’humidité et limite les problèmes de condensation et de moisissure.

💰 Côté prix, si ces matériaux restent encore un peu plus cher que les matériaux traditionnels, à la faveur des hausses vertigineuses de l’électricité et du gaz nécessaires à leur fabrication, la différence de prix s’est réduite en leur faveur.

Biosourcé ou recyclé ?

L’éventail des solutions « vertes » disponibles pour isoler est particulièrement étoffé. Les isolants peuvent être d’origine végétale, animale ou issus de la filière de recyclage. Leur point commun ? Leur empreinte carbone est faible et répond parfaitement aux exigences de la RE 2020.

👉 L’isolation biosourcée : les matériaux d'isolation naturels et renouvelables, autrement dits biosourcés, gagnent du terrain. La fibre de bois, la laine de mouton, la ouate de cellulose (issu de papier recyclé), le chanvre, le lin, le liège ont un impact moindre sur l'environnement par rapport aux isolants synthétiques traditionnels.

👉 L’isolation recyclée : l'utilisation de matériaux recyclés pour l'isolation, comme les vieux textiles ou le papier, contribuent à réduire la quantité de déchets et l'utilisation de ressources naturelles.

La ouate de cellulose est produite à partir de papier recyclé. www.soprema.fr © Pavatex by Soprema

Matériaux biosourcés, que choisir ?

Contrairement aux isolants d’origine minérale (laine de verre et de roche) ou pétrolière (polystyrène), les isolants « verts » sont très variés.

  • La fibre de bois. C'est le matériau biosourcé par excellence. Après un traitement mécanique, le bois est transformé en fibres ou en laines isolantes. Les panneaux de fibres présentent d’excellentes performances thermiques et acoustiques. La forte densité de la fibre de bois lui confère un très bon déphasage thermique. Un plus pour le confort d'été.
  • La laine de chanvre. La laine de chanvre est produite à partir de fibres de chanvre. Selon sa fabrication, elle peut contenir entre 40 à 80 % de fibres végétales de chanvre et des fibres de coton, de jute ou de lin. Le chanvre est un bon régulateur d’humidité et possède de bonnes performances thermiques et acoustiques. Il présente aussi un bon déphasage. Ses domaines d’application sont l’isolation des murs et la fabrication de blocs.
  • La paille de riz. En panneaux isolants semi-rigides, la paille de riz est adaptée à l’isolation des murs, toitures et planchers. Issu de la riziculture, notamment camarguaise pour ce qui concerne la production française, cet isolant a un très faible impact environnemental. Avec un coefficient de conductivité thermique lambda de 0 039, elle offre une performance dans la moyenne des isolants naturels. Côté phonique, elle affiche de bonnes qualités d’absorption et d’affaiblissement acoustiques.
  • La paille. Récoltée et valorisée après les moissons, la paille possède de nombreuses qualités, dont son prix. C’est l’un des isolants les moins chers du marché. Côté performances thermiques, la paille est dans la moyenne. Avec sa forte densité, elle participe efficacement au confort d’été. Enfin, ses qualités acoustiques sont bonnes.
  • La ouate de cellulose. Produite à partir de journaux ou de cartons recyclés, la ouate de cellulose s’inscrit dans l’économie circulaire. « Nous avons lancé une nouvelle ouate de cellulose fabriquée à partir des papiers supports d'étiquettes autocollantes appelés glassines », annonce François Magueur. La ouate de cellulose assure une bonne régulation de l’humidité, une excellente performance thermique et acoustique et sa production nécessite peu d’énergie. On l’emploie surtout en soufflage à sec dans les combles perdus.
  • Le textile recyclé. Les vieux vêtements ont droit à une deuxième vie. Une fois triés, ils sont défibrés et mélangés. Les fibres obtenues sont ensuite thermoliées. Elles présentent une excellente performance thermique et acoustique. De plus, le textile recyclé régule l’humidité.
  • La laine de mouton. La laine de mouton est l’un des rares matériaux d’isolation d’origine animale. Présentée sous forme de panneaux, elle régule bien l’humidité et présente de bonnes performances thermiques et acoustiques.

Des matériaux certifiés

Les isolants biosourcés restent des matériaux comme les autres ! Ils doivent répondre aux exigences du Code de la construction et de l’habitat par des évaluations et des documents techniques. Ils sont sous avis techniques (ATec) et possèdent un Document technique d’application (DTA) ou relèvent d’une norme produit. « Tous les matériaux disposent de toutes les certifications existantes ! », confirme François Magueur. Qu’ils soient en chanvre, en laine de mouton ou en fibre de bois, les isolants sont certifiés Acermi au même titre que la laine de verre ou de roche ou le PSE, une garantie objective et impartiale de leurs performances thermiques.

🙋‍♀️ Côté assurance, il n’existe aucune différence avec un matériau classique. S’ils disposent d’Avis techniques, d’un DTA ou de Règles de l’art (Règles professionnelles, NF DTU), ils entrent dans le champ de garanties de l’assurance décennale sans extension de garantie ni supplément de prime.

Le label Biosourcé

Le label « Produit biosourcé » a pour objectif d’améliorer la visibilité et la reconnaissance des produits de construction contenant un pourcentage significatif de matières premières biosourcées. Un seuil minimal d’intégration de matière biosourcée est fixé à 70 % pour les isolants. Le Biosourcé Plus valorise les produits dont la teneur en biosourcé est supérieure à 80 %. Les maisons NF habitat ou NF Habitat HQE peuvent aussi s’inscrire dans la démarche d’obtention du label Biosourcé.

👉 Le premier niveau du label impose la mise en œuvre d’au moins deux produits de construction biosourcés appartenant ou non à la même famille et remplissant des fonctions différentes.

👉 Pour les deuxième et troisième niveaux, il est demandé la mise en œuvre d’au moins deux familles de produits de construction biosourcés (bois d’œuvre, fibres de bois, paille, ouate de cellulose, coton recyclé, isolant en fibres de chanvre…) et une origine naturelle encore plus importante.


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